Budō XI Iaidō Club d’art martial de pratique du sabre ou Iaidō, situé à Paris

Musō Shinden ryū

Musō Shinden ryū est une école japonaise de sabre ou Iaïdō dont les techniques ont été codifiées par Nakayama Hakudo dans les années 1930. Comme toute école de sabre, elle se caractérise par un style propre et un corpus de kata (ou figures). Musō Shinden ryū est l’héritière d’écoles (koryū) de sabre anciennes dont elle fait vivre la tradition.

Musō Shinden ryū est, avec l’école Musō Jikiden Eishin ryū, l’une des deux écoles de Iaïdō les plus pratiquées au Japon. Ces deux écoles sont d’ailleurs relativement proches, à la fois par leur origine et des kata communs.

Origine et histoire

A l’origine, les écoles Musō Shinden ryū et Musō Jikiden Eishin ryū sont issus d’une même école qui aurait été fondée au XVIIe par Hayashizaki Jinsuke Minamoto no Shigenobu. D’abord connue sous le nom de lignée Jinsuke ou Musō Shimmei ryū, l’école se développe sous l’influence d’une succession de Soke (grands maîtres).

Au début du XVIIIe, son 7e Soke Hasegawa Chikaranosuke Eishin (ou Hidenobu) aménage la pratique pour tenir compte d’un sabre plus court et incorpore des techniques en provenance d’autres ryū. La tradition rapporte que l’enseignement de Hasegawa Eishin est alors adopté assez largement dans la province de Tosa, sans que cela puisse être prouvée.  L’école reprendra ensuite son nom Eishin pour s’appeler (notamment) Musō Jinsuke Eishin ryū.

Etablie dans la province de Tosa, Musō Jinsuke Eishin ryū se scinde en deux lignée à la mort de son 11e Soke : la première lignée dite Shimomura-ha (du nom de son 14e Soke, Shimomura Mōichi Sadamasa) donnera naissance à Musō Shinden ryū, tandis que Musō Jikiden Eishin ryū descend de la deuxième lignée, dite Tanimura-ha (du nom du 15e Soke, Tanimura Kame no Jō Yorikatsu).

Les lignées Shimomura et Tanimura vont cependant rester perméable l’une à l’autre. D’une part, géographiquement, elles se développent dans la province de Tosa et notamment dans sa capitale Koishi. Les deux lignées ont en effet interdiction de faire sortir leurs techniques, transmises comme secrètes, en-dehors de la province.

D’autre part Musō Shinden ryū et Musō Jikiden Eishin ryū ont été créés par des Soke ayant bénéficié d’un enseignement dans les deux lignées Tanimura et Shimomura. Ainsi Musō Jikiden Eishin ryū voit le jour sous l’impulsion d’Oe Masamichi (1853 – 1927), 17e Soke Tanimura-ha, qui renouvelle en profondeur la pratique et l’enseignement du sabre en combinant les techniques Tanimura et Shimomura, complétées par des apports d’autres écoles, notamment Omōri.

Nakayama Hakudo (1869 – 1958), 16e Soke Shimomura-ha, se basera d’ailleurs sur l’enseignement d’Oe Masamichi, dont il reprend par exemple la plupart des kata, en plus de ses propres recherches, pour développer son style Musō Shinden ryū.

Mais n’anticipons pas trop : Nakayama Hakudo se fait tout d’abord connaître à Tokyo et est élève de Negishi Shingoro maître du style shindō Munen-ryū dont il reçoit le titre de plus haut niveau à l’âge de 28 ans[1]. Il entreprend également l’étude d’autres ryū et voyage ainsi au travers de tout le japon. Deux écoles vont particulièrement le marquer : Shintō Muso ryū et Muso Shinden Eishin ryū (ou Hasegawa Eishin-Ryū).

C’est cette dernière école qui nous intéresse plus particulièrement : en 1916, Nakayama Hakudo est accepté comme élève par Hosokawa Yoshimasa, 15e Soke de la lignée des Shimomura-ha – dont il devient lui-même le 16e Soke –, ainsi que de Morimoto Tokumi de la lignée Tanimura-ha, un maître de la même génération que Oe Masamichi. Nakayama Hakudo est alors le premier « étranger » à la province de Tosa être admis dans cette école.

En 1920, le Dai Nippon Butokukai décerne à Nakayma Hakudo le titre Hanshi en Kendo et en Iaido. En 1922, Tokumi lui concède le grade Menkyo Kaiden dans l’école Goto Ha Musō Jikiden Eishin, tandis que Yoshimasa lui donne le grade Menkyo de l’école Musō Shinden Eishin.

En 1930 Nakayama Hakudo, à la demande du Dai Nippon Butokukai, effectue une démonstration de Musō Shinden Eishin ryū en-dehors de la province de Tosa, une première historique. Nakayama Hakudo préfère cependant présenter sa démonstration sous le nom Musō Shinden ryū batto-jutsu pour éviter tout problème avec les écoles de Tosa.

C’est un peu plus tard, vers 1932 / 1933, que Nakayama Hakudo restructure ce qu’il a appris de l’école Musō Shinden Eishin ryū, ainsi que d’autres écoles, sous le nom de Muso Shinden ryū, en utilisant le Kenji pour vision ou rêve. Le nom Musō Shinden ryū ne fut cependant véritablement popularisé que bien plus tard, à partir du milieu des années 50 et surtout, par ses élèves, après la mort de Nakayama Hakudo en 1958.

Si Nakayama Hakudo est présenté comme le 16e Soke ou grand maître de la lignée Shimomura, c’est essentiellement en raison de sa réputation, de son intime connaissance des écoles de sabre de son époque et de ses techniques de coupe, plutôt que d’une succession formelle qui reste quelque peut insaisissable. Nakayama Hakudo ne nommera d’ailleurs pas de successeurs officiels. Deux de ses élèves, Hashimoto Tōyo et Saitō Isamu, sont cependant considérés respectivement comme 17e et 18e Soke, mais non sans contestations.

Comprendre le nom Musō Shinden ryū

Habituellement, Musō Shinden ryū se traduit ainsi : mu (夢) peut se comprendre par rêve ; sō (想) par pensée ; shin (神) signifie Dieu ; den (伝) par racine ; et ryū (流) veut dire école. Musō shinden ryū signifie donc une école développée selon une vision divine apparue lors d’un rêve[2].

Cependant une telle traduction est à prendre avec un peu de recul. Les sons « musō » et « shin » se retrouvent de manière récurrente dans l’histoire des écoles de sabre, mais ne sont pas toujours représentés par les mêmes caractères kanji  (caractère idéo-syllabique japonais) d’une école à l’autre.

Pour un japonais, c’est en fait à l’auditeur / lecteur de faire sa propre interprétation à partir des différents sens possibles des sons et caractères. Il y a également, associé au Kanji, des considérations esthétiques et spirituelles.

Par exemple le caractère « shin » signifie également « kami », que l’on traduit ici par « dieu », mais qui prend dans la conception japonaise une connotation shintoïste assez loin des conceptions « classiques » de dieu en occident.

La « vision divine » peut ainsi se comprendre comme la vision d’un style, mais éventuellement de tout autre chose. Musō Shinden ryū est donc un nom très riche en signifiants, d’accès plus ou moins difficiles.

Les Kata du style Musō Shinden ryū

L’école Musō shinden ryū comporte 3 séries de kata :

Enfin, outre ces trois séries de kata, il convient de noter qu’il existe également des techniques impliquant plusieurs pratiquants, appelées Kumitachi, qui correspondent à la partie kenjutsu de l’enseignement. Ces techniques ne sont que très rarement pratiquées.

Shoden

1 Shohatto
2 Sato
3 Uto
4 Atarito
5 Inyohshintai
6 Ryuto
7 Junto
8 Gyakuto
9 Seichuto
10 Koranto
11 Inyoshintai Kae Waza
12 Batto

Chuden

1 Yoko Gumo
2 Tora Issoku
3 Ina Zuma
4 Uki Gumo
5 Yama Oroshi
6 Iwa Nami
7 Uroko Gaeshi
8 Nami Gaeshi
9 Taki Otoshi
10 Nuki Uchi

Okuden

Waza

1 Kasumi
2 Sunegakoi
3 Tozume
4 Towaki
5 Shihogiri
6 Tanashita
7 Ryozume
8 Tora Basiri

Tachi Waza

1 Yukizure
2 Tsuredachi
3 Somakuri
4 Sodome
5 Shinobu
6 Yukichigai
7 Sodesurigaeshi
8 Moniri
9 Kabezoe
10 Ukenagashi
11 Itomagoi

Vidéos de démonstration

Démonstrations des kata muso Shinden Ryu par Nagae Matasaburo.

Shoden

Chuden

Waza

Tachi Waza

Notes

  1. La notion de « dan », n’est apparue que dans les années 50, l’approche traditionnelle était pour le maître de délivrer un diplôme pour son style lorsqu’il estimait que l’élève l’avait maîtrisé, celui-ci pouvant alors ouvrir son dojo.
  2. Deborah Klens-Bigman (voir ci-dessous) propose plus simplement « transmission d’une vision divine ».

Références Bibliographiques